Pollution de l’air : un impact sous-estimé sur la santé
Le lien entre pollution de l’air et maladies graves n’est plus une hypothèse, mais une réalité chiffrée. Pour la première fois, Santé publique France publie une étude détaillant les conséquences sanitaires directes de la pollution atmosphérique. Asthme, cancer du poumon, maladies cardiovasculaires, diabète… les données sont édifiantes.
Publiée le 29 janvier 2025, cette enquête d’envergure révèle que des milliers de maladies et décès pourraient être évités chaque année si les niveaux de pollution respectaient les recommandations de l’OMS. Dans le Grand Est, cela représenterait jusqu’à 5 600 nouveaux cas de maladies évitables chaque année et près de 3 900 décès prématurés en moins.
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Une étude choc qui met en lumière les ravages de la pollution
Menée entre 2016 et 2019, l’étude se concentre sur deux polluants majeurs : le dioxyde d’azote (NO2) et les particules fines (PM2,5). Ces particules invisibles, mais omniprésentes dans l’air que nous respirons, sont responsables de nombreuses pathologies graves.
Dans la région Grand Est, 15 % des cas d’asthme pédiatriques pourraient être évités chaque année en réduisant ces polluants. Les cancers du poumon liés aux particules fines représentent 8 % des cas diagnostiqués, et les maladies chroniques comme la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) ou le diabète de type 2 sont aussi directement impactées.
Si la pollution de l’air diminue et atteint les seuils recommandés par l’OMS, ce sont entre 200 et 2 300 maladies respiratoires infantiles qui pourraient être évitées chaque année. Un chiffre qui remet en cause l’inaction politique et la tolérance aux niveaux actuels de pollution.

Diesel et chauffage au bois : des coupables identifiés
Parmi les sources majeures de pollution, deux responsables sont particulièrement pointés du doigt : le diesel et le chauffage au bois.
Le Dr Thomas Bourdrel, radiologue et fondateur du collectif Strasbourg Respire, tire la sonnette d’alarme depuis des années sur les dangers des particules issues de la combustion du gazole et du bois. Selon lui, la situation en Alsace est critique :
“L’hiver à Strasbourg, le chauffage au bois représente 90 % des particules ultrafines, les plus toxiques et les plus cancérigènes. C’est un vrai problème de santé publique.”
Il souligne également un manque de cohérence dans les politiques locales. Alors que la région Auvergne-Rhône-Alpes a interdit les cheminées anciennes datant d’avant 2002, l’Alsace ne semble pas prendre le même chemin, malgré des niveaux de pollution préoccupants.
Quant aux véhicules diesel, le report de l’interdiction des vignettes Crit’Air 3 dans l’Eurométropole de Strasbourg est une décision jugée « très dommageable » par les experts. Ces véhicules, parmi les plus polluants encore en circulation, sont pourtant l’une des principales sources de NO2, un gaz reconnu pour ses effets nocifs sur les voies respiratoires.
Une prise de conscience nécessaire pour des actions concrètes
Face à ce constat accablant, les experts insistent sur l’urgence d’agir. Santé publique France rappelle que des efforts ont été faits, mais qu’ils restent insuffisants.
“La qualité de l’air s’améliore depuis plusieurs années, mais nous sommes encore loin des seuils recommandés par l’OMS”, admet Étienne Koszul, directeur général d’Atmo Grand Est. “Atteindre ces objectifs nécessite un engagement fort, aussi bien des pouvoirs publics que des acteurs privés.”
Pour réduire les effets de cette pollution, les solutions existent :
- Limiter le trafic routier, en favorisant les mobilités douces et les transports en commun.
- Améliorer l’efficacité énergétique des logements, pour réduire le recours au chauffage au bois et aux combustibles polluants.
- Encadrer les pratiques agricoles, responsables d’émissions d’ammoniac et de méthane qui participent à la formation des particules fines.
Cette étude a le mérite de remettre la pollution de l’air au cœur du débat public. Les chiffres sont clairs : réduire les émissions polluantes, c’est sauver des vies. Il reste maintenant à voir si les décideurs prendront enfin les mesures à la hauteur de l’urgence sanitaire.